Fonds en euros classiques : Sauvez le système, sauvez-vous !


Mis à jour le: 10/07/2018 à 14h56 par Jonathan Levy

 

Baisse taux fonds euros

Le projet de loi dit « Sapin 2 » a été définitivement adopté au Parlement le 8 novembre.

La loi prévoit de donner plus de pouvoir au HCSF (Haut Conseil de Sécurité Financière), en l’autorisant à bloquer les sorties (rachats, arbitrages, avances) sur tout ou partie du portefeuille des compagnies d’assurance-vie, en cas de risque systémique. Cette loi est extrêmement défavorable pour les détenteurs de contrats d’assurance-vie. Mais ne nous trompons pas de combat. Le problème n’est pas la loi, mais les fonds en euros eux-mêmes.

 

Les encours de l’assurance-vie s’élèvent actuellement à plus de 1 600 milliards d’euros, au sein desquels les fonds en euros pèsent 80% (soit 1 300 milliards d’euros). Les sommes sont considérables, puisqu’elles représentent environ 70% du PIB en France. On comprend aisément alors que les risques supportés sur ces fonds soient « systémiques ». Mais précisément, qu’est-ce que cela veut dire ?
Tous les acteurs du secteur supportent un risque identique, celui de la remontée des taux. Dans ce cas là, tous les acteurs auront des difficultés financières, parce qu’ils détiennent tous un portefeuille d’actifs plus ou moins similaires. Tous ces portefeuilles sont essentiellement constitués d’obligations dont la valeur serait en moins-value en cas de remontée des taux. Le caractère moutonnier des assureurs, associé au niveau des encours fait vraiment porter un risque systémique : si le risque se matérialise, compte tenu des enjeux, l’Europe devrait permettre alors à l’Etat de venir en aide au système d’une manière ou d’une autre. Cela se retrouvera alors dans le niveau de la dette de l’Etat, un peu comme l’Irlande qui a vu son déficit et sa dette exploser en 2010 après avoir aidé ses banques.

 

Lorsque que le risque se matérialise, il est souvent trop tard pour réagir. En cas de forte hausse des taux, il est vraisemblable que les clients cherchent à sortir des fonds en euros pour se diriger vers des placements plus rémunérateurs. Les compagnies d’assurance seraient alors obligées de vendre leurs actifs et d’enregistrer des pertes importantes. Les fonds propres des compagnies seraient probablement insuffisants. La perspective de faillite des assureurs pourrait provoquer une panique de la part des épargnants. On constate généralement dans ce cas que cela accélère le phénomène de fuite, avec un impact négatif pour les compagnies d’assurance. C’est un cercle vicieux dont il est difficile de sortir. La loi Sapin 2 n’apporte pas de bonne réponse à la gestion de ce risque. Elle permet tout au plus de gagner du temps, mais elle ne résout pas le problème. Pour résoudre la crise, l’Etat pourrait peut-être forcer les compagnies d’assurance à répercuter une partie de leurs pertes sur les contrats des clients. Le risque de liquidité pourrait se traduire par un risque de perte ! La loi prévoit déjà ce type de résolution de crise pour le système bancaire.

 

En tout état de cause, personne n’a intérêt à se retrouver dans cette situation, ni les épargnants, ni les assureurs, ni l’Etat. La meilleure solution, selon nous, est de dégonfler les fonds en euros dès aujourd’hui.
Du point de vue des épargnants, cela fait du sens puisque les fonds en euros classiques offrent des rendements très bas (encore en forte baisse cette année), et un risque de liquidité (et de perte ?) important. Le couple rendement / risque n’est pas flatteur, si bien qu’il vaut mieux sortir des fonds en euros tant que cela est possible sans pénalités.

 

Du point de vue des assureurs aussi, il est plus intéressant que les clients sortent aujourd’hui, car leur portefeuille d’actifs est plutôt en plus-value actuellement. Une sortie des fonds en euros vers d’autres actifs permettraient de renforcer les réserves des compagnies d’assurance, et donc d’améliorer leur solvabilité.

 

Enfin, pour l’Etat, le sujet majeur est celui du financement de sa dette, puisque justement une partie non négligeable est détenue par les assureurs. Mais il y a actuellement une fenêtre de tir inédite, avec le programme de rachat de dette souveraine de la BCE.

 

On le voit, tous les acteurs sont dans le même bateau. Et lorsque la crise arrive, c’est un leurre de croire que l’on peut s’en sortir sans perdre de plumes. Souvent la crise déboule tel un tsunami et emporte tout sur son passage. Dans l’intérêt de chacun, dans l’intérêt de tous, c’est aujourd’hui qu’il faut agir.

 

Pour sauver le système, pour vous préserver vous-même, sortez des fonds en euros classiques !

Par Jonathan Levy

Président, co-fondateur de bienprévoir.fr

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